Eva Bartova

(1955-2012)

Le Verre Historique est avant tout l’histoire d’une passion, un indéfectible amour pour l’histoire, et aussi celle d’une volonté inébranlable devant les épreuves de la vie.

C’est l’histoire d’Eva Bartova, surnommée la « dame de verre » dans le milieu de la reconstitution historique….verre dont elle avait certes la fragilité (émotionnelle surtout), mais aussi l’éclat, la transparence, la lumière.

Née en 1955, elle nous quitte en 2012, en laissant un grand vide, mais aussi et surtout l’envie de développer son formidable héritage culturel et humain.

Le projet, basé sur l’étude, la recherche et la reconstitution de verrerie ancienne, est né au milieu des années 1990 à l’initiative d’Eva, historienne de l’art et linguiste issue de l’Université Libre de Bruxelles, riche de ses multiples origines et influences culturelles (Tchèquie, Italie, Belgique)

Ce projet se concrétise en 1997, lorsqu’elle rencontre différents maîtres et apprentis verriers, et les initie au travail et au soufflage du verre « à l’ancienne » (respect des outils, des matériaux et des gestes du passé, pour obtenir des répliques fidèles)

Ce processus d’archéologie expérimentale rencontre un vif intérêt du public, lors de quelques manifestations à thème historique, et surtout de nombreuses institutions culturelles (Musées, Archéosites ou Associations en Belgique, France, Allemagne et ailleurs), qui se procurent volontiers des répliques de verres pour garnir leurs boutiques ou expositions.

En quelques années, au fil des collaborations et des différents projets de recherche, Eva Bartova parvient à établir une collection d’environ 100 modèles de verres, basés sur des originaux allant de l’époque romaine au XVIIIème siècle, et dont l’historicité est largement reconnue et attestée.

Quelques grandes étapes du Verre Historique

Au cours des années, de nombreux partenariats et collaborations ont pu être mis en place. Citons notamment :

L’Institut Royal du Patrimoine Artistique (IRPA, Bruxelles) pour la reconstitution en 2002 de la verrerie retrouvée dans les fouilles de l’ancien Palais Royal (Coudenberg, Bruxelles)

– La Communauté d’Agglomération du Douaisis (France) en 2005 pour la reconstitution du « vase bleu » (XIème s.), sur base de fragments retrouvés lors des fouilles de la place St Aimé (Douai)

La Fédération des Archéologues du Talou et des Régions Avoisinantes (FATRA) en 2003 et 2005 pour la reconstitution d’un four à verre, avec les paramètres de l’époque mérovingienne, dans l’Archéosite de Blangy-sur-Bresle (France)

L’association Antiquitates (Viterbo, Italie) en 2006 pour la reconstitution de flacons à parfums étrusques et romains

Entre 2000 et 2009, Eva Bartova publie également des articles sur l’histoire de la verrerie dans des revues spécialisées et est sollicitée pour  diverses conférences et expositions.

– 2009 : Conférence en compagnie de l’archéologue Yves De Bechennec (Saint Denis, France) au sujet de la reconstitution de bracelets en verre gaulois. Collaboration avec le Service du Patrimoine du Département de la Seine Saint-Denis et l’Association Franciade.

– 2010 : présentation de la restauration du calice de Dusenbach au Cercle de Recherche Historique de la Ville de Ribeauvillé (Alsace, France) – voir article

Les productions du Verre Historique font l’unanimité et deviennent une référence en matière de reconstitution historique. De nombreux modèles sont commandés au fil des années pour différents  projets : le Cinéma, les expositions, les reconstitutions, les spectacles.

« Fils du sable et du feu, né du souffle et de la main d’artisans amoureux de leur art et de l’histoire, le verre historique, à travers vase, gobelets, carafes, … permet de lever un peu le voile sur l’art du verre au fil du temps et de revivre ses techniques traditionnelles et séculaires.

À partir des vestiges du passé tels des fragments de verre précieusement recueillis lors de fouilles archéologiques, des œuvres d’art ancien et des manuscrits ancestraux, l’archéologue et le maître verrier s’efforcent d’étudier, d’interpréter et de reconstituer la réalité historique en étroite collaboration avec les musées. Sous l’action du feu, le sable, la soude et la chaux se transcendent en une matière fluide et vivante qui peut s’étirer, se gonfler et prendre toute les formes et toute les couleurs. Une fois refroidi, il est d’une dureté incomparable, cependant au moindre choc, il se brise. Grâce à ses propriétés exceptionnelles, cette substance magique a permis à l’homme d’en tirer une grande diversité d’applications. Depuis la nuit des temps, de génération en génération, nos ancêtres verriers s’efforcèrent de dompter le verre. Ces alchimistes ont fait progresser les techniques, tout en conservant jalousement leurs secrets.

Dans le dessein de dévoiler ces arcanes oubliés et en quête d’authenticité, l’atelier « Le Verre Historique », à travers l’archéologie expérimentale, analyse et tente de restituer dans des répliques d’aujourd’hui, les procédés techniques et les modèles d’hier. Dans certains cas, une pièce exige la conception d’un outil précis.

De la passion, de la patience, du doigté et de l’humilité, il faut tout cela afin de mettre au point les recettes de fabrication, d’apprivoiser la matière et de recouvrer les savoir-faire anciens dans le respect du passé. Ainsi, pour créer le fameux Verre fougère dans la plus pure tradition, entre dans la composition de la potasse extraite de la cendre de fougère lui conférant cette teinte olivâtre caractéristique. Les stries, les impuretés et les petites bulles d’air présentes au hasard dans la masse vitreuse personnalisent chaque œuvre tout en la rendant unique. Sous les pièces, les traces de détachement du pontil sont révélatrices du travail de façonnement entièrement accompli à la main.

Dans un même élan de pérennité, après cinq ans de recherches, un four de chauffage au bois traditionnel est désormais à disposition en Seine-Maritime. Sa mise en service étant fort onéreuse (six à sept stères de bois pour quelques heures de chauffe), il est réservé à des commandes spéciales ou à des reconstitutions grandeur nature. Nos verres tentent de restituer des modèles historiques émanant essentiellement d’Europe occidentale depuis l’époque gallo-romaine jusqu’au XVIIe siècle.

D’une époque à l’autre, selon les goûts et les modes, les paraisons soufflées bouche, tantôt pansues, tantôt élégantes se voient ornementées à chaud de pieds, de jambes, d’anses ou de toutes sortes d’appendices délicatement façonnés à la pince. Les artistes du feu poussent parfois le raffinement par l’adjonction d’incrustation de feuilles d’or, de fils de verre multicolores ou de cabochons. À froid, le verre est susceptible de recevoir une décoration gravée, taillée ou émaillée.

À la manière des alchimistes en quête du grand œuvre, nous nous efforçons humblement de ressentir et revivre au travers de nos reconstitutions les nobles valeurs et savoir-vivre des artisans du verre d’autrefois. »

Pour le collectif de l’atelier “ Le Verre Historique ”

Eva Bartova